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BOURGES

de l’archevêque qu’elle produit un effet charmant.

La découverte de ce jardin où l’on trouve des ombrages sombres par une journée de soleil éclatant a été un véritable bonheur pour moi. Après trois heures passées à étudier et admirer la cathédrale, le repos sous ces vieux arbres était délicieux. Peut-être ce jardin ne me semble si beau qu’à cause de la laideur amère des plaines que je viens de traverser. J’y ai trouvé un monument élevé à un grand citoyen qui a perfectionné les moutons.

Ce jardin a des bancs fort commodes, à dossier comme ceux de Londres, ce qui a commencé à me donner un grand respect pour le maire de la ville. À l’aide d’un de ces bancs, j’ai lu presque tout le Roméo de Shakspeare. Je me suis aperçu qu’un grand mur, situé à vingt pas de moi, était criblé de balles. Voici un des inconvénients du voyage que je fais en dehors de la société et des savants de province, je n’ai pu savoir qui avait tiré ces balles ; malgré toutes mes grâces, aucun des rares promeneurs, d’ailleurs fort polis, n’a pu me l’apprendre ; je reste donc avec ma conjecture : ces balles auront été lancées dans les guerres de religion. Mais sont-elles protestantes ou catholiques ?

J’entends au bout du jardin une marche