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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

et flatté de cette marque extrême d’intérêt ; mais, habitués à nous tutoyer dans le secret de nos familles, pourrions-nous toujours assez nous observer en public ? et un tu ou toi ne viendrait-il pas avec inopportunité et la grande habitude d’être plus souvent ensemble solitairement que dans les cérémonies d’apparat où nous devons nous trouver ensemble ? Non, votre simple ami et vicaire ne doit pas se permettre de vous dire toi, je ne le pourrais jamais ; notre dignité mutuelle s’oppose aussi à ce que vous me fassiez cette faveur tout seul, et, me tutoyant sans que j’osasse le faire pour vous, cher de Noé, ne serait-ce pas m’assimiler à votre domesticité ? — Ah ! tu as raison. Eh bien ! pour ce soir seulement dis-moi toi. — Ah ! je le veux, oui toi, mon bon, mon véritable et sincère ami, reçois de nouveau l’hommage de tous mes sentiments de respect et d’affection durable, sincère et éternel, et sois assuré quoique ne nous tutoyant pas au delà de la soirée, que tu auras toujours en moi le plus dévoué serviteur. »

Amanda Moulin.




Bourges, le 20 juin 1837.

Je vais faire un aveu qui n’est guère gentleman like, et qui m’ôtera bien des sympathies je viens d’avoir le plaisir de me séparer de ma calèche et de mon domes-