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l’admirable source du Doubs, où je les ai vus jaillir du rocher.

Mâcon a un joli quai qui sert de promenade au beau monde. Nous y voyons une lionne apprivoisée qu’un jeune officier a ramenée d’Afrique. Cette guerre est admirable, et n’est pas trop payée à vingt millions par an. Elle montre aux Cosaques quelles gens nous sommes encore, et désigne à l’estime de la nation des généraux comme MM. Duvivier et Lamoricière.

Mâcon est fière de son gros pont, long, massif, fort utile sans doute, mais peu avenant. Ce pont conduit dans une des contrées les plus arriérées et les plus curieuses de France, le pays de Dombes.

Le paysan y est stupide et a la fièvre six mois de l’année. Pour tirer parti du terrain, on le met en étangs sept années de suite, ce qui donne beaucoup de poisson ; puis on fait écouler l’eau, et l’on obtient, sans engrais, trois ou quatre récoltes magnifiques. Dans le pays de Dombes, les cinq sixièmes de la population croient aux sorciers, et tous les trois ou quatre ans on a un beau miracle. Cet état de la basse classe plaît beaucoup à de certaines gens que le lecteur nomme pour moi. Comme je disais assez étourdiment que la France devrait faire cadeau de vingt mille francs par an à ce malheureux pays