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impatienté du bruit que faisait la haine contre Piron, s’avisa de crier : Paix donc ! on n’entend rien.

Ce n’est pourtant pas faute d’oreilles ! répliqua Piron. Ce mot n’était pas mal brave. Tous les spectateurs se jettent sur lui : il parvient à sortir de la salle, mais il est poursuivi dans les rues à coups d’épées et de bâtons ; et peut-être aurait-il péri, si un Beaunois n’avait eu la grandeur d’âme de lui ouvrir sa porte et de lui donner asile.

Piron composa contre les habitants de cette pauvre ville une foule d’épigrammes, et les Dijonnais ont pris plaisir à l’imiter. Tous les jeux de mots auxquels peut donner lieu la comparaison d’un sot avec un âne ont été employés jusqu’à satiété, et les Beaunois n’ont pas eu l’esprit de faire, ou d’acheter à Paris, une seule bonne épigramme contre Dijon.

Il y a quelques années qu’un écrivain, homme d’esprit, se retira à Beaune. Les gens du pays eurent peur qu’il ne se moquât d’eux, et on dit qu’il a été obligé de vendre son jardin et d’aller se réfugier dix lieues plus loin.

Les Beaunois trouvèrent un jour, vers 1803, dans le lit de la Bourgeoise, un grand nombre de médailles d’or ; il y en avait, dit-on, pour vingt mille francs. Un amateur proposa de payer l’or au