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MÉMOIRES D’UN TOURISTE.

coutume de son peuple, détruisit tout ce qui offrait quelque apparence de civilisation. Les Bourguignons et les Huns se disputèrent les ruines d’Autun. Enfin parurent Rollon et ses Normands, qui achevèrent de détruire le peu qui subsistait encore.

Malgré tant de malheurs, Autun est l’une des villes les plus curieuses de France. Ses citoyens ont toutes les vertus, mais assurément ils n’aiment point les antiquités. Aussi tard que 1762, ils ont construit un séminaire avec les pierres de leur amphithéâtre. En 1788, ils employèrent ce qui restait des matériaux de ce monument pour réparer leur église de Saint-Martin, détruite depuis peu. Cet amphithéâtre avait peut-être été bâti sous Vespasien.

Autun est situé sur le penchant d’une colline rapide, auprès de la rivière d’Arroux, et au pied de trois monticules qui la couvrent à l’orient et au midi.

En arrivant à Autun, j’ai eu le vif plaisir de marcher sur les pierres d’une voie romaine : la rue est rapide, et les chevaux ont grand’peine à se tenir sur ces blocs de granit.


— Autun, le 30 avril 1837.

Hier j’eus du courage ; couvert de poussière et en habit de voyage, j’affrontai la curiosité et les regards hébétés des provinciaux, le tout pour aller voir des antiquités.

La porte d’Arroux ou de Sens est un admirable ouvrage des Romains ; c’est un arc de triomphe, avec deux grandes arcades, et, à côté, deux plus petites. Au-dessus, on voit six arcades plus étroites, formant une sorte de galerie ; il y en avait dix autrefois : quatre ont disparu. Les colonnes engagées entre ces arcades sont d’ordre corinthien.

Si l’on tient à avoir une idée de ce monument simple et grand, il faut en chercher une gravure ; il m’est impossible de donner une sensation ; je ne puis me résoudre à me jeter dans les phrases hyperboliques et néologiques, je ne peux qu’expliquer une gravure, non y suppléer.