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MÉMOIRES D’UN TOURISTE.

Plusieurs vastes armoires, remplies de statuettes antiques en bronze, de bustes, d’armes, d’idoles, lampes, boucliers, etc. Plusieurs de ces objets sont fort curieux ; mais le voyageur passe sans connaître leur mérite ; l’affiche est nécessaire même ici. On devrait leur passer au cou une petite notice écrite sur une carte à jouer ; il faudrait conserver la plupart du temps la forme dubitative : Il paraît que, etc., on peut supposer que, etc.

C’est le hasard tout seul qui fait faire des découvertes d’antiquités dans les environs de Lyon, ville si importante pour les Romains, que l’empereur Auguste habita trois ans, etc. Si jamais l’on cherche avec intelligence, sans doute l’on trouvera. Mais ce pays est fait pour s’occuper des métiers à la Jacquart.

Adoration des Mages, par Rubens, tableau capital ; c’est le genre éclatant et plein de verve de la Descente de Croix d’Anvers, inférieur à celui-ci pourtant ; provient du musée Napoléon.

En 1807, 1808 et années suivantes, le musée Napoléon, qui était encombré de tableaux, versa son trop plein dans plusieurs musées de province. En 1815, l’ennemi n’eut pas le temps de recueillir les tableaux qui se trouvaient à cent lieues de Paris. Il était pressé ; il craignait de voir les Français se réveiller de leur sot engourdissement, et former des guérillas. C’est ainsi que plusieurs des tableaux, fruit des victoires de 1796, sont restés dans les départements.

Dans ce Rubens, vigueur, coloris brillant, fougue de composition admirables. C’est un des beaux ouvrages du maître.

Adoration des Mages de Paul Véronèse ; beauté des têtes, sérieux du regard sans fâcherie, qu’on ne trouve que chez les peintres italiens. Tableau très-bien conservé, et qui plaît à l’œil ; belles couleurs de l’école de Venise ; fraîcheur quelquefois exagérée de Rubens. Le Flamand donne à une jambe de vieillard le coloris rosé que présente presque toujours le bras d’une jeune fille.

La Circoncision par le Guerchin ; l’un des meilleurs de la collection. Nappe blanche sur la table où l’on pose l’enfant ; ef-