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madame de Vaize, qui rougit beaucoup. Elle avait pour Lucien une confiance et une ouverture de cœur bien voisine d’un sentiment plus tendre ; Lucien le voyait un peu, mais il était si excédé de son amour pour madame Grandet que toute relation de ce genre lui faisait horreur. Une heure de promenade tranquille et sombre au pas de son cheval dans les bois de Meudon était ce qu’il avait trouvé de plus semblable au bonheur depuis qu’il avait quitté Nancy.

Lucien trouva les jours suivants madame de Vaize réellement irritée contre M. des Ramiers, et, comme elle avait plus de sensibilité que d’usage du monde, elle fit sentir sa colère au député journaliste d’une façon humiliante. Cet esprit si doux trouva, je ne sais comment, des mots cruels pour le moderne Fénelon, et ces mots, dits sans précaution au milieu de toute la cour qui entoure la femme d’un ministre puissant, furent cruels pour l’auréole de vertu et de philanthropie du député journaliste. Ses amis lui parlèrent, il y eut une allusion assez claire dans le Charivari, journal qui exploitait avec assez de bonheur la tartuferie de MM. du juste milieu.

Lucien avait vu passer une lettre du ministre des Finances annonçant que le directeur des Contributions indirectes