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place, tout près des ministres, ne sachant que penser. M. Leuwen monte à la tribune, libre de son opinion. Malgré la faiblesse de sa voix, il obtient une attention religieuse. Il est vrai que, dès le début de son discours, il trouve trois ou quatre traits fins et méchants. Le premier fit sourire quinze ou vingt députés voisins de la tribune, le second fit rire d’une façon sensible et produisit un murmure de plaisir, la Chambre se réveillait, le troisième, à la vérité fort méchant, fit rire aux éclats. Le ministre intéressé demanda la parole et parla sans succès. M. le comte de Vaize, accoutumé à l’attention de la Chambre, vint au secours de son collègue. C’était ce que M. Leuwen souhaitait avec passion depuis deux mois ; il alla supplier un collègue de lui céder son tour. Comme le ministre comte de Vaize avait répondu assez bien à une des plaisanteries de M. Leuwen, celui-ci demande la parole pour un fait personnel. Le président la lui refuse. M. Leuwen se récrie, et la Chambre lui accorde la parole au lieu d’un autre député qui cède son tour.

Ce second discours fut un triomphe pour M. Leuwen ; il se livra à toute sa méchanceté et trouva contre M. de Vaize des traits d’autant plus cruels qu’ils étaient inattaquables dans la forme. Huit ou dix