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M. Mairobert comme il aurait fait d’un général prussien commandant la ville qu’il assiégeait. Le général Fari parlait avec beaucoup d’égards de tout le monde, et même du préfet ; toutefois, il était évident qu’il n’était point infidèle à la règle qui fait du général l’ennemi naturel et instinctif du préfet qui fait tout dans le pays, tandis que le général n’a à vexer qu’une douzaine d’officiers supérieurs au plus.

À peine le général Fari avait-il reçu la lettre du ministre, que Leuwen lui avait envoyée en arrivant, qu’il l’avait cherché.

— Mais vous étiez à la préfecture. Je vous l’avouerai, messieurs, je tremble pour notre élection. Les 500 votants pour M. Mairobert sont énergiques, pleins de conviction, ils peuvent faire des prosélytes. Nos 400 votants sont silencieux, tristes. Je trancherai le mot avec vous, messieurs, car nous sommes au moment de la bataille, et tous les vains ménagements peuvent compromettre la chose, je trouve nos bons électeurs honteux de leur rôle. Ce diable de M. Mairobert est le plus honnête homme du monde, riche, obligeant. Il n’a jamais été en colère qu’une fois dans sa vie, et encore poussé à bout par le pamphlet noir…

— Quel pamphlet ? dit Leuwen.

— Quoi ! monsieur, M. le préfet ne