Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/407

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

livres de rente. Madame la princesse de Vaudémont était à ses ordres. Ces gens ne manquent pas de tact, la plupart ont servi sous dix ou douze ministres, la personne qu’ils étudient de plus près, avec le plus de soin, c’est leur ministre. Je les ai surpris jadis ayant des conférences entre eux à ce sujet. Même, j’ai été consulté par deux ou trois qui m’ont des obligations d’argent. Quatre ou cinq, M. le comte N…, par exemple, que tu vois chez moi, quand ils peuvent écumer une nouvelle, veulent jouer à la rente, et n’ont pas toujours ce qu’il faut pour couvrir la différence. Je leur rends service, par-ci par-là, pour de petites sommes. Enfin, pour te dire tout, j’ai obtenu l’aveu, il y a quinze jours, que le Beausobre a une colère mue contre toi. Il passe pour n’avoir du cœur que lorsqu’il y a un grand cordon à gagner. Peut-être rougit-il de s’être trouvé faible en ta présence. Le pourquoi de sa haine, je l’ignore, mais il te fait l’honneur de te haïr.

Mais ce dont je suis sûr, c’est qu’on a organisé la mise en circulation d’une calomnie qui tend à te faire passer pour un saint-simonien retenu à grand-peine dans le monde par ton amitié pour moi. Après moi, tu arboreras le saint-simonisme, ou te feras chef de quelque nouvelle religion.