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niais en apparence et choisi sur sa mine, recule deux pas et campe au Kortis un coup de fusil dans le ventre. Le conscrit s’est trouvé être un chasseur des montagnes du Dauphiné. Voilà Kortis blessé mortellement, mais le diable c’est qu’il n’est pas mort.

— Voici l’affaire. Maintenant, le problème à résoudre : Kortis sait qu’il n’a que trois ou quatre jours à vivre, qui nous répond de sa discrétion ?

On (id est le Roi) vient de faire une scène épouvantable au général N… Malheureusement je me suis trouvé sous la main, on a prétendu que moi seul avais le tact nécessaire pour faire finir cette cruelle affaire comme il faut. Si j’étais moins connu, j’irais voir Kortis, qui est à l’hôpital de…, et étudier les personnes qui approchent son lit. Mais ma présence seule centuplerait le venin de cette affaire.

Le général N… paie mieux ses employés de police que moi les miens ; c’est tout simple : les garnements qu’il surveille inspirent plus de craintes que ceux qui sont la pâture ordinaire de la police du ministère de l’Intérieur. Il n’y a pas un mois que le général N… m’a enlevé deux hommes, ils avaient cent francs de traitement chez nous, et quelques pièces de cinq francs par-ci, par-là quand il leur arri-