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le lendemain

ment de tout ce qu’il y trouvait. Son amie, appuyée sur lui, le regardait ; lui, regardait ces bijoux, ces chiffons qui, la veille d’un mariage, emplissent une corbeille de noce.

J’aurais pu épouser un tel homme ! pensait quelquefois madame de Rênal ; quelle âme de feu ! quelle vie ravissante avec lui !

Pour Julien, jamais il ne s’était trouvé aussi près de ces terribles instruments de l’artillerie féminine. Il est impossible, se disait-il, qu’à Paris on ait quelque chose de plus beau ! Alors il ne trouvait point d’objection à son bonheur. Souvent la sincère admiration et les transports de sa maîtresse lui faisaient oublier la vaine théorie que l’avait rendu si compassé et presque si ridicule dans les premiers moments de cette liaison. Il y eut des moments où, malgré ses habitudes d’hypocrisie, il trouvait une douceur extrême à avouer à cette grande dame qui l’admirait, son ignorance d’une foule de petits usages. Le rang de sa maîtresse semblait l’élever au-dessus de lui-même. Madame de Rênal, de son côté, trouvait la plus douce des voluptés morales à instruire ainsi, dans une foule de petites choses, ce jeune homme rempli de génie, et qui était regardé par tout le monde comme devant un jour