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Lamiel pensa que, si elle ne passait pas par le village, elle ne courrait pas le risque d’être dénoncée à sa tante par certaines dévotes qui habitaient à côté de la maisonnette du maître d’école.

Tout en courant le long de l’ancien chemin hors du village, Lamiel fit la fâcheuse rencontre de quatre ou cinq vieilles femmes du village, portant des paniers remplis de sabots.

Autrefois Mme  Hautemare était aussi pauvre que ces femmes, et se livrait aux mêmes travaux pour gagner sa vie ; la protection de M. le curé Du Saillard avait tout changé. Ces femmes, qui marchaient nu-pieds, portant leurs sabots sur la tête, s’aperçurent bientôt que Lamiel était vêtue avec beaucoup plus de soin qu’à l’ordinaire ; apparemment sa tante Hautemare l’avait menée au château, chez Mme  la duchesse.

— Hé ! hé ! te voilà bien fière parce que tu viens du château ! dit l’une.

— Je ne sais ce qui me tient, s’écria une seconde ; nous allons t’ôter tes beaux souliers. Pourquoi ne marcherais-tu pas nu-pieds comme nous ?

Lamiel ne perdit point courage ; elle monta dans le champ qui dominait le chemin de plu-