Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/305

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sang des Nerwinde ne pouvait se démentir ; elle m’a envoyé un paquet de lettres de change et vous avez encore le temps de vous habiller avant l’Opéra.

L’idée de l’Opéra et d’y être dans une heure fit bien vite oublier à notre héroïne l’idée triste du comte d’Aubigné-Nerwinde tué par un coup de pistolet. Ils entrèrent chez divers marchands où la jeune provinciale changea de robe, de chapeau, de châle. En allant à l’Opéra, le comte lui dit :

— Votre père sous-préfet me fait peur ; s’il réussit dans son élection, on ne lui refusera pas un ordre pour enlever une fille rebelle, et que deviendrait mon amour ? ajouta-t-il d’un air froid.

Lamiel le regarda et sourit :

— Appelez-vous Mme  de Saint-Serve. Je choisis ce nom parce que je suis possesseur d’un fort beau passeport à l’étranger sous ce nom de Saint-Serve.

— Mais j’hérite des belles actions de cette madame, et quelles actions !

— C’était une jeune fille moins jolie que vous, mais qui avait aussi un père dangereux ; elle partait, nous trouvâmes plus sage de la faire porter