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mons éternels, mais Lamiel en ayant répété l’ordre, il fallait bien partir.

Lamiel fut gaie jusqu’à la folie en se trouvant seule et débarrassée des éternels propos aimables et complimenteurs du jeune duc. Elle commença par acheter une paire de sabots, et prit sous le bras la femme de charge de la maîtresse d’hôtel.

— Courons les champs, ma chère Marthe, lui dit-elle, fuyons cet éternel boulevard de Rouen que le ciel confonde.

Marthe, la voyant s’égarer à travers champs, suivant de petits sentiers, et quelquefois ne suivant pas de sentiers du tout et s’arrêtant pour jouir de son bonheur, lui dit :

— Il ne vient pas ?

— Qui donc ?

— Mais apparemment cet amoureux que vous cherchez.

— Dieu me délivre des amoureux ! j’aime mieux ma liberté que tout. Mais est-ce que vous n’avez pas eu d’amoureux ?

— Si fait, répondit Marthe à voix basse.

— Et qu’en dites-vous ?

— Que c’est une chose délicieuse.

— Eh bien ! rien n’est plus ennuyeux pour moi.