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et les Alpes fort au loin ; il suivait de l’œil, au pied de la citadelle, le cours de la Parma, sorte de torrent, qui, tournant à droite à quatre lieues de la ville, va se jeter dans le Pô. Par delà la rive gauche de ce fleuve, qui formait comme une suite d’immenses taches blanches au milieu des campagnes verdoyantes, son œil ravi apercevait distinctement chacun des sommets de l’immense mur que les Alpes forment au nord de l’Italie. Ces sommets, toujours couverts de neige, même au mois d’août où l’on était alors, donnent comme une sorte de fraîcheur par souvenir au milieu de ces campagnes brûlantes ; l’œil en peut suivre les moindres détails, et pourtant ils sont à plus de trente lieues de la citadelle de Parme. La vue si étendue du joli palais du gouverneur est interceptée vers un angle au midi par la tour Farnèse dans laquelle on préparait à la hâte une chambre pour Fabrice. Cette seconde tour, comme le lecteur s’en souvient peut-être, fut élevée sur la plate-forme de la grosse tour, en l’honneur d’un prince héréditaire qui, fort différent de l’Hippolyte fils de Thésée, n’avait point repoussé les politesses d’une jeune belle-mère. La princesse mourut en quelques heures ; le fils du prince ne recouvra sa liberté que dix-sept ans plus tard en montant sur le trône à la mort de son