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délivre de deux hommes qui s’attachaient à le poursuivre. Fabrice arrive en courant jusqu’à la porte du palais Sanseverina ; par curiosité, le portier avait ouvert la petite porte haute de trois pieds pratiquée dans la grande, et regardait tout ébahi ce grand nombre de flambeaux. Fabrice entre d’un saut et ferme derrière lui cette porte en miniature ; il court au jardin et s’échappe par une porte qui donnait sur une rue solitaire. Une heure après, il était hors de la ville, au jour il passait la frontière des états de Modène et se trouvait en sûreté. Le soir il entra dans Bologne. Voici une belle expédition, se dit-il je n’ai pas même pu parler à ma belle. Il se hâta d’écrire des lettres d’excuse au comte et à la duchesse, lettres prudentes, et qui, en peignant ce qui se passait dans son cœur, ne pouvaient rien apprendre à un ennemi. J’étais amoureux de l’amour, disait-il à la duchesse ; j’ai fait tout au monde pour le connaître, mais il paraît que la nature m’a refusé un cœur pour aimer et être mélancolique ; je ne puis m’élever plus haut que le vulgaire plaisir, etc., etc.

On ne saurait donner l’idée du bruit que cette aventure fit dans Parme. Le mystère excitait la curiosité ; une infinité de gens avaient vu les flambeaux et la