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occuper une des premières places ; j’y suis arrivé ; mais mes jours les plus heureux sont toujours ceux que de temps à autre je puis venir passer à Milan ; là vit encore, ce me semble, le cœur de votre armée d’Italie.

La franchise, la disinvaltura avec laquelle parlait ce ministre d’un prince si redouté piqua la curiosité de la comtesse ; sur son titre elle avait cru trouver un pédant plein d’importance, elle voyait un homme qui avait honte de la gravité de sa place. Mosca lui avait promis de lui faire parvenir toutes les nouvelles de France qu’il pourrait recueillir ; c’était une grande indiscrétion à Milan, dans le mois qui précéda Waterloo ; il s’agissait alors pour l’Italie d’être ou de n’être pas ; tout le monde avait la fièvre, à Milan, d’espérance ou de crainte. Au milieu de ce trouble universel, la comtesse fit des questions sur le compte d’un homme qui parlait si lestement d’une place si enviée et qui était sa seule ressource.

Des choses curieuses et d’une bizarrerie intéressante furent rapportées à madame Pietranera : Le comte Mosca della Rovere Sorezana, lui dit-on, est sur le point de devenir premier ministre et favori déclaré de Ranuce Ernest IV, souverain absolu de Parme, et, de plus, l’un des princes les