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vifs plaisirs que j'aie sentis depuis long­temps. Dupuy a une figure singulièrement vive, franche et spirituelle ; il ajoutait à l'illusion ; je me crus au milieu de ce peuple si brave, si franc et si généreux, exempt de tous les petits intérêts de la vie, et vivant comme un frère avec tous ces hommes si aimables et si grands qui excitaient le rire par leurs ouvrages in­génieux, pouvant exciter l'admiration par leurs actions courageuses.

Voilà de ces plaisirs vifs que donne le monde ; mais ils ne paraissent pas, parce qu'on n'en avertit pas son voisin, et on ne les raconte pas, parce que, dans le monde, c'est-à-dire avec des gens froids, ayant des passions flétries, à la vanité près, rien de plat comme de ra­conter un bonheur qu'on ne fait pas par­tager à son voisin en le racontant. C'est ce qui fait que les philosophes ont tracé des images si tristes des plaisirs du monde, ils ne les connaissaient pas, n'y allant jamais.

Je suppose un de ces messieurs dans la chambre à côté de celle où, hier, nous dîmes tant de folies et sans doute de sot­tises ; le brave homme aurait haussé les épaules à chaque mot, et aurait dit ensuite que ces plaisirs sont bêtes et ennuyeux. Eh ! non, censeur idiot ! C'est vous qui