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ma tente pour me trouver au milieu du tumulte. D’un côté un groupe d’indigènes furibonds, de l’autre notre propre bande. Sept ou huit de nos hommes, réfugiés derrière le canot, avaient leurs fusils braqués sur la foule, qui vociférait et grossissait de plus en plus ; mais nulle part je ne voyais Livingstone.

« Où est le docteur ? demandai-je.

– Il est parti pour aller dans la montagne, me dit Sélim.

– Est-ce qu’il est seul ?

– Non, maître ; Souzi et Chumâ sont avec lui.

– Prenez deux hommes, dis-je à Bombay, et allez avertir le docteur ; vous le prierez de revenir en toute hâte. »

Comme je finissais de donner cet ordre, je vis Livingstone, avec ses deux Noirs, au sommet d’une colline, d’où il regardait complaisamment la scène dont notre petit bassin lui offrait le curieux tableau ; car, en dépit de sa gravité, l’affaire était sérioso-comique. Ce dernier élément y était représenté par un jeune homme entièrement nu et complètement ivre, qui, tout en roulant de côté et d’autre, battait le sol avec sa ceinture, et criait et jurait, par ceci et par cela, que pas un Zanzibarien, pas un Arabe ne séjournerait un instant sur le territoire sacré du pays de Sansi. Son père, le sultan du lieu, n’était pas moins ivre que lui, bien qu’il montrât un peu moins de violence.

Sélim venait de me glisser ma carabine à seize coups, munie de toutes ses cartouches, lorsque arriva le docteur. Du ton le plus calme, Livingstone demanda