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Les jours coulaient paisiblement ; nous étions heureux sous les palmiers d’Oujiji. Mon compagnon reprenait des forces ; la vie lui revenait ; il retrouvait son enthousiasme pour la tâche qu’il avait entreprise ; et son ardeur au travail lui faisait vivement souhaiter d’agir. Mais que pouvait-il avec cinq hommes et soixante mètres d’étoffe ?

« Connaissez-vous la partie nord du lac, lui demandai-je un soir ?

— Non, dit-il, j’ai essayé de m’y rendre ; mais les Vouajiji ont voulu me traiter de la même façon que Burton et que Speke, c’est-à-dire m’écorcher ; et je n’étais pas riche. Si j’avais fait cette course, je n’aurais pas pu aller dans le Manyéma, ce qui était bien plus intéressant. La grande ligne de drainage du centre de l’Afrique, dans cette région, est le Loualaba. Comparée à l’étude de cette ligne, la question de savoir si le Tanganîka est uni à l’Albert N’Yanza par un cours d’eau n’est plus qu’insignifiante.

— La grande voie de l’écoulement central, est, dis-je, une rivière qui part du onzième degré de latitude sud et que j’ai suivie sur une étendue de sept degrés. Le Chambézi, ainsi qu’on nomme cette rivière dans sa partie supérieure, reçoit les eaux d’une vaste contrée, située au midi de la source la plus méridionale du lac Tanganîka ; c’est donc le point le plus important. D’après ma croyance, un cours d’eau sortant du lac que nous avons ici, et que j’appelle le Haut-Tanganîka, va rejoindre le lac de Baker, l’Albert N’Yanza, qui serait le Tanganîka-Inférieur. Cette opinion est fondée sur les rapports des Arabes, et sur l’observation que j’ai faite du courant, au moyen des plantes aquatiques. Mais cela demande plus de réflexion et d’étude.

« À votre place, repris-je, je ne voudrais pas quitter l’Oujiji, sans avoir levé mes doutes à cet égard ; il est possible qu’une fois parti, vous ne reveniez plus de ce côté. La Société géographique de Londres attache à cette question une grande importance, et déclare que vous seul êtes en position de la résoudre. Si je peux vous être utile à ce sujet, vous n’avez qu’un mot à dire. Bien que je ne sois pas venu en Afrique pour me livrer aux découvertes, je serais

    c’est la consolation, le salut de Livingstone, la faculté pour lui de continuer son œuvre ; or sans toutes les causes qui ont permis de le secourir, l’assistance n’eût pas été nécessaire. Au lieu de reprendre la route du lac, il gagnait l’Égypte, et arrivait en Europe le jour ou, par la générosité de Bennett et par le dévouement de Stanley, dont nous sommes profondément touchée, il est reparti pour le Manyéma. (Note du traducteur.)