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vous stupéfier ; une cité modèle combinée de façon à offrir sécurité et confort.

Quittant la forêt après une heure de marche, nous trouvâmes, au débûché, un ruisseau murmurant et limpide qui fuyait au nord-ouest, et que nous saluâmes avec une joie dont les hommes, qui n’ont eu pendant longtemps d’autre breuvage qu’un liquide sans nom, puisé dans des trous fangeux, dans des salines, au fond de mares nauséabondes, peuvent seuls comprendre l’étendue.

Au delà de ce ruisseau est une chaîne escarpée et rocheuse. Elle fut gravie, et nos regards s’arrêtèrent sur un pays pittoresque et varié ; véritable fête pour nos yeux fatigués des bois, rassasiés de hautes tiges et de feuillage. Une foule de petits cônes et de monts détachés, à cime plate, s’éparpillaient dans une immense étendue, qui, de l’Oukonongo méridional, gagnait le territoire des Vouafipa, et allait rejoindre la plaine de Kikoua ; tandis qu’en face de nous se dressait la ligne de faîte qui sépare le Roungoua du Malagarazi, et qu’à peu près à vingt milles de cette chaîne, du côté de l’ouest, s’en déployait une autre qui se dirigeait du nord au sud.

Mais plus de charme pour la vue que d’agrément pour la marche. Notre camp fut établi dans la jungle, près d’un étroit ravin à fond vaseux, d’où ruissellent une partie des eaux qui forment les sources du Roungoua. Ce n’était là qu’un échantillon des nombreux bourbiers que nous aurions à franchir ; les uns de quelques pas seulement, les autres de plusieurs centaines de mètres ; bourbiers parfois recouverts de roseaux et de papyrus, ou offrant à leur surface des centaines de filets d’une eau rougeâtre et visqueuse, remplie d’animalcules.

À quelques milles au sud de la chaîne que j’ai appelée Kaséra, du nom de la contrée qu’elle divise en deux parties égales, ces lits fangeux, devenus convergents, débouchent dans l’Ousensé, large rivière marécageuse qui se traîne d’abord au sud-ouest, où, après avoir reçu des tributaires du nord et du nord-est, elle devient un cours d’eau d’une certaine importance, s’unit à une rivière qui descend de l’Ourori, et forme le Roungoua, qui se jette dans le Tanganîka à soixante milles de cette jonction.

Il m’a été dit que le Roungoua était considéré dans le pays comme ligne de démarcation entre l’Ousohoua, qui est au nord de son cours, et l’Oufipa, qui se trouve au sud.

Nous venions d’achever la palissade du camp, lorsque j’entendis mes hommes apostropher une petite bande d’indigènes qui se diri-