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Les palais desséchés de mes hommes firent prendre à ceux-ci la résolution de percer la croûte du fond de la cuvette, ce qui fut exécuté avec d’énormes bâtons, sorte d’épieux rustiques. Parvenus à six pieds de profondeur, mes gens furent récompensés de leurs efforts, en voyant suinter des parois de leur citerne quelques gouttes d’un liquide boueux qu’ils avalèrent avidement. L’insuffisance de la source n’étant que trop réelle, des gens de bonne volonté prirent des seaux, des gourdes, des bidons, et partirent pour un tongoni, situé dans l’Oukamba. Ils revinrent au bout de trois heures, nous rapportant une provision d’eau claire et potable, qui fut vite épuisée.

Une demi-heure après, nous étant dirigés vers le sud, nous arrivions nous-mêmes à ce tongoni, ainsi que, dans cette région, s’appelle un établissement désert. Il y avait là trois ou quatre villages en ruine et des champs étendus complètement ravagés ; c’était l’œuvre des Rouga-Rouga de Mirambo. Ceux des habitants qui avaient survécu à ce désastre avaient émigré dans l’Ougara, province située au couchant de leur ancienne demeure. Un grand troupeau du buffles s’abreuvait à l’étang où nos bidons avaient été remplis, et qui naguère approvisionnait d’eau les villages incendiés.

De gros blocs d’hématite surgissaient au milieu des bois que nous venions de traverser, et où les fruits sauvages étaient en abondance. Ceux du tamarinier, du mtogoué, qui est un strychnos, et une espèce de petite prune, que l’on trouve fréquemment dans cette région, nous ont fourni plus d’un repas agréable.

Le coucou indicateur, l’oiseau du miel, est très-commun dans les forêts de l’Oukonongo. Son cri est une série d’appels vifs et sonores. Les indigènes savent fort bien se servir de lui pour découvrir le trésor que les abeilles ont amassé dans le creux des arbres. Tous les jours mes Vouakonongo m’apportaient d’énormes rayons pleins d’un miel délicieux, rouge ou blanc. Les gâteaux où était le miel rouge contenaient généralement beaucoup d’abeilles mortes ; mais nos gens, d’une gloutonnerie excessive, ne s’en inquiétaient pas, et mangeaient non-seulement les abeilles mais une grande partie de la cire.

Aussitôt que l’oiseau du miel aperçoit un homme, il jette des cris animés, saute de brindille en brindille, passe d’une branche à l’autre, puis sur l’arbre voisin, en multipliant son appel. L’indigène, qui connaît l’oiseau, n’hésite pas à le suivre. L’homme ne vient pas assez vite ; le guide rebrousse chemin ; il crie plus fort,