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d’Apollon. Elle vient dans ces lieux pour obéir à l’oracle. Vous, prêtre de ce temple, repousserez-vous celle que vous avez tant aimée ?

ALCÉE.

Non, sans doute. Puisse-t-elle rentrer dans ce sanctuaire où ses lauriers sont suspendus ; où sa lyre, accordée par la main même d’Apollon, peut encore étonner l’univers !

DIOTIME.

Ah ! je ne l’espère plus ; elle écarte tout ce qui lui rappelle sa gloire. Ma fille seule, Cléone, à peine âgée de quinze ans, l’intéresse encore : il semble qu’elle se repose dans son entretien, et que la candeur de cet âge ait pour elle quelques charmes. Cléone est enthousiaste de son talent ; depuis qu’elle vit, elle l’admire : mais la douleur de Sapho l’accable, et souvent je me reproche de la laisser témoin de cet égarement du génie, qui semble dévoiler à nos regards les plus redoutables secrets de la fatalité. Mais qui pourroit se résoudre à laisser Sapho sans appui ! Alcée, vous qui l’avez aimée, vous qui pouvez vous élever à ses plus hautes pensées, ne sauriez-vous lui faire quelque bien ?