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notes

Proposition XXVIII. — Il est manifeste que, dans une philosophie de l’immanence, connaître Dieu, c’est se connaître soi-même clairement ; de même l’amour de soi, loin d’être opposé à l’amour de Dieu, l’enveloppe.


Proposition XXXV, Corollaires I et II, Scolie. — L’homme a besoin de l’homme pour être lui-même. L’individualisme, compris comme il doit l’être, donne donc à la société humaine, à la morale sociale, un fondement rationnel, et cela suffit pour rendre acceptables pour la raison les conditions de la vie commune, même quand elles sont en elles-mêmes peu satisfaisantes pour la raison.

À la fin du Scolie, Spinoza promet de traiter ailleurs de la supériorité de l’homme sur la bête et de l’intérêt plus grand qu’il y a à considérer les actions humaines. Nulle part, à ma connaissance, il ne revient expressément sur ce sujet.


Proposition XXXVII et Scolie I. — a) Le désir du bien d’autrui est la conséquence du besoin que nous avons d’autrui et aussi du penchant à accorder nos sentiments avec ceux d’autrui. Fondés en raison en eux-mêmes, ce désir et ce penchant peuvent avoir, avant l’affranchissement, un caractère purement affectif ou passionnel. On conçoit ainsi que, sinon la moralité véritable (voir, au sujet de ce terme, la note relative au Scolie de la Proposition 18), du moins une conduite conforme aux exigences de la vie sociale et méritant, par suite, l’approbation du philosophe, puisse être l’effet d’un désir non rationnel. La libération de l’âme par la science n’est pas nécessaire à l’accomplissement d’une fonction sociale ; on peut être un honnête homme et un citoyen utile sans être un sage, et se conduire comme la raison l’ordonne, bien qu’on ne soit pas vraiment raisonnable. De même, l’obéissance à ce qu’on croit être la loi divine quand elle est l’effet non de la crainte, mais d’un sentiment religieux qui n’est pas encore l’amour intellectuel de Dieu (voir la partie V), mais est déjà une joie (telle est la foi du croyant sincère), a non sans doute le même prix que la connaissance claire, mais un certain prix ; une âme incapable de s’élever jusqu’à la science trouve dans la certitude morale du salut fondée sur la révélation de l’Écriture un repos qui, sans équivaloir à l’inaltérable contentement intérieur du philosophe, en est un substitut acceptable pour beaucoup d’hommes. La raison ne saurait nous faire admettre toutefois qu’on parvienne au véritable salut ou à la pleine béatitude par cette voie (cf. la note 31 de Spinoza relative au chapitre xv du Traité théologico-politique) et, par conséquent, cela n’est pas. La révélation ou ce