Page:Spinoza - Éthique, trad. Appuhn, 1913.djvu/424

Cette page a été validée par deux contributeurs.
420
ÉTHIQUE

souvent il est contraint, voyant le meilleur, de faire le pire. Je me suis proposé, dans cette Partie, d’expliquer cet état par sa cause et de montrer, en outre, ce qu’il y a de bon et de mauvais dans les affections. Avant de commencer, toutefois, il convient de présenter quelques observations préliminaires sur la perfection et l’imperfection et sur le bien et le mal.

Qui a résolu de faire une chose et l’a parfaite, son œuvre est parfaite, non seulement à l’en croire, mais au jugement de quiconque sait droitement ou croit savoir la pensée de l’Auteur et son but. Si, par exemple, on voit une œuvre (que je suppose n’être pas achevée) et si l’on voit que le but de l’Auteur est d’édifier une maison, on dira que la maison est imparfaite, et parfaite au contraire sitôt qu’on la verra portée au point d’achèvement que son Auteur avait résolu de lui faire atteindre. Mais, si l’on voit une œuvre sans avoir jamais vu rien de semblable et qu’on ignore la pensée de l’artisan, certes on ne pourra savoir si elle est parfaite ou imparfaite. Telle paraît être la première signification de ces vocables. Quand, toutefois, les