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ÉTHIQUE

chacun par ce qui précède que les affections peuvent se combiner entre elles de tant de manières, et que tant de variétés naissent de là, qu’on ne peut leur assigner aucun nombre. Mais il suffit à mon dessein d’avoir énuméré les principales ; pour celles que j’ai omises, elles seraient objet de curiosité plus que d’utilité. Il reste cependant à observer au sujet de l’Amour que, par une rencontre très fréquente, quand nous jouissons de la chose appétée, le Corps peut acquérir par cette jouissance un état nouveau, être par là autrement déterminé, de façon que d’autres images de choses soient éveillées en lui, et que l’Âme commence en même temps à imaginer autre chose et à désirer autre chose. Quand, par exemple, nous imaginons quelque chose, à la saveur de quoi nous avons accoutumé de prendre plaisir, nous désirons en jouir, c’est-à-dire en manger. Mais, tandis que nous en jouissons ainsi, l’estomac se remplit, et le Corps se trouve dans un autre état. Si donc, dans cette disposition nouvelle du Corps, l’image de ce même aliment se maintient parce ce qu'il est présent, et conséquemment aussi l’effort de ce Désir d’en man-