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DE DIEU

ils ont coutume d’être déterminés à des actions semblables, et ainsi jugent-ils nécessairement de la complexion d’autrui par la leur. Comme, en outre, ils trouvent en eux-mêmes et hors d’eux un grand nombre de moyens contribuant grandement à l’atteinte de l’utile, ainsi, par exemple, des yeux pour voir, des dents pour mâcher, des herbes et des animaux pour l’alimentation, le soleil pour s’éclairer, la mer pour nourrir des poissons, ils en viennent à considérer toutes les choses existant dans la Nature comme des moyens à leur usage. Sachant d’ailleurs qu’ils ont trouvé ces moyens, mais ne les ont pas procurés, ils ont tiré de là un motif de croire qu’il y a quelqu’un d’autre qui les a procurés pour qu’ils en fissent usage. Ils n’ont pu, en effet, après avoir considéré les choses comme des moyens, croire qu’elles se sont faites elles-mêmes, mais, tirant leur conclusion des moyens qu’ils ont accoutumé de se procurer, ils ont dû se persuader qu’il existait un ou plusieurs directeurs de la nature, doués de la liberté humaine, ayant pourvu à tous leurs besoins et tout fait pour leur usage. N’ayant jamais reçu au sujet de la complexion de ces êtres aucune information, ils ont dû