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lières. En nous rappelant que M. Fronde explique les phénomènes historiques comme produits par des causes naturelles, nous devons conclure qu’il considère certaines classes de faits sociologiques (ceux qui se rattachent à l’économie politique, par exemple) comme scientifiquement explicables, tandis que les autres classes ne le sont pas. Si telle est son idée, il n’est pas facile de comprendre que les résultats des volitions humaines, considérées une à une ou dans leur ensemble, soient incalculables, et que cependant les faits de l’économie politique puissent être traités scientifiquement ; car ces faits, aussi bien que les autres faits sociaux, sont déterminés par des volontés agrégées. De même le chanoine Kingsley reconnaît, tout aussi clairement les lois économiques, et aussi certaines lois sur le progrès — il va jusqu’à mettre ses auditeurs en garde contre l’idée qu’il puisse nier l’application de la méthode inductive aux phénomènes sociaux — il faut donc supposer qu’il considère cette méthode inductive comme n’étant que partiellement applicable. Il est en droit de s’appuyer sur le titre et sur quelques passages de son discours pour soutenir qu’il a simplement voulu dire qu’il y avait des limites à l’explication précise des faits sociaux. Cette attitude ne semble pas conciliable avec la doctrine qu’il peut y avoir des dérogations aux lois sociales, providentiellement ou autrement ; mais nous ne faisons qu’indiquer ces critiques secondaires, et nous répliquons qu’en ce cas, sa réponse est en dehors de la question. S’il veut dire simplement que les prévisions sociologiques ne peuvent être qu’approximatives, — s’il dénie seulement la possibilité de faire de la science sociale une science exacte : nous disons que c’est là nier une chose que personne n’a soutenue. La science exacte n’est qu’une moitié de la science. Les phénomènes de certains ordres ont seuls des relations quantitatives aussi bien que qualitatives. Dans les autres ordres, les facteurs qui produisent les phénomènes sont si nombreux et si difficiles à mesurer, qu’il devient très-difficile, sinon impossible, de développer sous la forme quantitative la connaissance que nous en avons. Ces ordres de phénomènes ne sont pas pour cela exclus du domaine de la science. En géologie, en biologie, en psychologie, la plupart des prévisions ne sont que qua-