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peu que nous avons cité suffira. De telles différences de lois, d’usages, de sentiments et de croyances, dans les relations domestiques, nous permettent d’imaginer quelle peut être la multiplicité des anomalies apparentes présentées par les relations sociales prises en masse. Il n’est pas besoin pour s’en rendre compte d’étudier des tribus barbares ou des races étrangères semi-civilisées. Reportons nos regards en arrière et observons les sociétés européennes à leurs débuts. Nous ne manquerons pas de faits prouvant que les relations que l’expérience journalière nous fait voir entre les phénomènes sociaux, ne sont nullement nécessaires. Nous citerons pour exemple les conceptions religieuses.

Celles qui subsistent de nos jours parmi les nations civilisées sont d’une grossièreté qui nous prépare à en trouver d’encore plus grossières dans les temps passés. Tout à côté de Boulogne, on voit un crucifix au pied duquel pourrit un monceau de croix formées de deux fragments de lattes réunis par un clou. Ce sont les passants qui déposent là ces croix dans l’espoir de s’attirer la faveur divine. Quand on jette un coup d’œil sur la voie ferrée qui passe à côté, quand on se rappelle les merveilles accomplies par les Français dans le domaine de la science, on ne peut se défendre d’un sentiment de surprise. On s’étonnera à bon droit encore davantage en voyant, comme cela se passe en Espagne, donner un combat de taureaux au profit de l’Église — en faveur d’une Sainte Maison de Miséricorde ! Et quelque grandes que semblent ces disconvenances entre les idées religieuses et les états sociaux d’aujourd’hui, en remontant en arrière on trouve des disconvenances encore plus étonnantes. Étudiez les différentes représentations de mystères et voyez quelles conceptions elles impliquaient chez les gens de l’époque ! Il ne faut pas oublier que les mystères étaient le produit d’une certaine théorie du gouvernement divin et qu’un peu plus tard on brûla ceux qui niaient cette théorie. Voici comme on inscrivait les appointements des acteurs :

« Imprimis, à Dieu ijs.
« Item, à Cayphas iijs, iiijd.
« Item, à un des chevaliers ijs.
« Item, au diable et à Judas xviijd.