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j’userais des allitérations, des assonances, des fausses rimes et de tout ce qui me semblerait commode… » ; il ne veut pas dire plus « facile », mais « commode » pour une plus large étendue d’expression.

Or, si les réformes suivies depuis vingt ans n’eussent dû aboutir qu’à des moyens non pas plus expressifs, mais plus abandonnés, c’eût été vraiment s’agiter dans le vide. Le poète, pas plus qu’aucun artiste, n’a besoin de « facilités » ; les anciens vers sont tyranniques non pour leurs règles étroites, mais pour leurs règles arbitraires. Jamais un vrai poète ne sera ou n’a été gêné par quoi que ce soit ; et s’il commet des chevilles, c’est qu’il ne peut pas ne pas en commettre, et que les moyens d’art les plus indépendants ont leurs chevilles. M. FrancNohain a très bien démontré les chevilles du vers libre.

Mais le « libéré » (qui, en tant, que « facilité » fut inventé par M. Jean Aicard, Othello, préface), a surtout ceci d’illogique, comme celui de Verlaine, qu’il retient entre les vieilles mailles un « vers libre » déjà implicitement contenu dans les rejets de Victor Hugo. Aussi va-t-il mettre à nu, très vite, les raisons profondes d’entière composition rythmique qui est appelée « vers libre ».

On s’apercevra qu’avec le « libéré » on obéit toujours à une syllabation mécanique et aux artifices pédants, aux « lois de fantaisie », de ces abominables « rhétoriqueurs » du xv° siècle, reprises dans un autre sens par les poétiqueurs du xvi« , qui sont les vrais patrons de la versification française. Ces rhétoriqueurs démarquèrent simplement les traités languedociens du xive siècle. Les pauvres poètes français n’y furent pour rien et se sont laissé faire, parce qu’il faut des circonstances bien spéciales pour que les poètes ne se contentent pas de l’instrument