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Or, il n’y a pas plus de hasard dans levers libre que dans le plus rigide alexandrin : il ne tend qu’à substituer une loi organique interne à une loi extérieure mécanique.

Parenthèse à lire tout de suite. — (Il est bien entendu qu’en art, lorsqu’on se sert du terme loi, il ne peut être question, quelle que soit leur valeur scientifique réelle, de lois rigoureuses et d’une fixité astronomique, mais de simples déterminantes générales et de deux ou trois principes, non immuables bien qu’à peu près constants, dont la violation s’autorise facilement de raisons passagères. Une loi en art n’est organique que si elle est souple.)

Rappelons et recassons certains clichés :

Cliché I. — Le vers libre, quoi qu’il fasse, quelque perfection qu’il atteigne, est condamné à l’avortement, parce qu’il se manifeste en dehors de toutes les conditions historiques où se soient jamais produites des modifications dans l’art des vers. Il ne tient aucun compte de la physionomie originelle et indépendante du vers qui, en admettant qu’il évolue, a, dans toutes les littératures, toujours évolué sur lui-même, sans perdre les deux ou trois caractères essentiels de sa structure. La condition première d’une forme d’art, surtout lorsqu’elle est attachée comme notre poétique à la naissance d’une langue, a des racines qu’il n’est au pouvoir d’aucun génie de brutalement couper. Ces racines sont d’autant plus fortes, longues et profondes que l’arbre a grandi et qu’il épanouit un plus vaste feuillage.

Réponse. — Nous pourrions aisément répondre qu’il n’est pas de conditions historiques qui ne doivent céder à la nécessité vitale de conditions physiologiques et scientifiques nouvelles,