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de deux affluents : cet « idéalisme constructif » qui lui vient de Stéphane Mallarmé et la source instinctive de Paul Verlaine qui lui donna le réalisme sentimental. Ces eaux de nature adverse sont mêlées dans le même fleuve, elles ne peuvent se désunir, pas plus que les poètes ne les distinguaient jadis dans leurs bons jours. La même pièce de Tristan l’Hermite dont plus haut nous tirions une strophe, nous offre cette autre :

Ce rossignol mélancolique

Du souvenir de son malheur

Tasche de charmer sa douleur

Mettant son histoire en musique.

Ce rappel discret et ce sourire voisinant avec l’infinitude de l’impression qui surprenait dans les ombres des « joncs pendants »

Les songes de Veau qui sommeille

disent bien commeon peut remonter notre courant double presque dès l’origine uni. — Ensuite par le réalisme sentimental, « l’expression directe » ne s’oppose pas au symbole ainsi que l’avance justement à un point de vue d’ensemble M. André Beaunier. Rien n’est plus « direct » que l’expression du détail chez les symbolistes ; ils ont toujours eu des sens précis pour soutenir leur imaginative, comme de purs poètes populaires qu’ils sont dans une autre sphère que la paysanne. Les vrais symbolistes, et là est leur originalité grande, ne se filient uniquement ni à Mallarmé ni à Verlaine ; ils les confondent en eux, à la fois ou tour à tour, avec les atavismes de Vigny et de Musset. Verlaine est de la lignée de Musset. Et l’un des premiers