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cinq aussi beaux à citer. Gustave Kahn, inventeur étonnant, imagination fastueuse, apte à susciter les plus neuves visions, à créer les plus ensorcelantes musiques ; Emile Verhaeren, halluciné, hanté de fantasmagories redoutables et belles, terrifié du spectacle que son rêve lui suggère, évocateur des féeries qui dorment au fond des ténèbres de l’âme ; Vielé-Griffin, subtil, sage et mélodieux, métaphysicien délicat, penseur attentif, incertain quelquefois entre l’allégresse de la vie et la mélancolie du souvenir ; Maurice Maeterlinck qui trouva des phrases imprévues pour rendre évident et palpable le mystère essentiel du Destin, de la Mort, de l’Existence et de toute réalité ; Henri de Régnier, dont c’est le privilège merveilleux de n’apercevoir les idées que sous la forme plastique, et dont l’œuvre est toute en images, parfaites de grâce ou de majesté !…

« Ces cinq poètes sont, je crois, bien portants. Ils sont jeunes. Les derniers poèmes qu’ils aient publiés ne sont pas très anciens. Je ne sache pas qu’aucun d’entre eux ait annoncé l’intention de passer à l’Humanisme… En vérité, le Symbolisme n’est pas mort, et il y aurait de la précipitation désinvolte à vouloir célébrer tout de suite sa pompe funèbre. »

Puis deux vaillantes revues soutinrent les idées générales et la dignité de l’œuvre d’art : le vieil et inébranlable Ermitage, le jeune et strict Occident. « L’Occident », en particulier, montra du doigt les équivoques insanes dont sonneurs et fossoyeurs vivaient à nos dépens :

« Equivoque sur« l’emprisonnement des techniques », alors que ce n’est que par le scrupule des techniques que l’art d’âge en âge se libère de la tyrannie des formules… Equivoque sur « la séparation de l’artiste et de la foule », sur l’art « retiré de la vie », et rabâchages de réunions publiques sur la « tour d’ivoire », alors que la « tour d’ivoire » du poète comme du savant est ce laboratoire de la