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à celle du moyen âge régnait parmi l’élite des esprits juvéniles. En plein xixe siècle, quand la société moderne faisait retentir son fracas, tout sonore des prodiges futurs et des possibilités inconnues, dans l’instant que vivaient Pasteur et Berthelot, on assista à cet extraordinaire spectacle de toute une génération s’adonnant subitement aux pires perversions intellectuelles, au mépris de la vie, au culte du mysticisme le plus étrange et le plus malsain.

« On put voir des jeunes hommes intelligents méconnaître Us notions les plus élémentaires de la science et de la philosophie contemporaines, tirer vanité d’une érudition illusoire, occupés uniquement à s’assimiler les fantaisies cérébrales, les anomalies de pensées, les démences superstitieuses, les bizarreries littéraires, tout ce que la folie humaine avait pu produire de scories et de monstres depuis trente siècles que nous nous exprimons (!!!)

« Aux soirées de La Plume, tous les samedis, dans un caveau du Boul’Mich’ s’entassait une pittoresque cohue de bardes mystiques, de peintres de l’âme, de chansonniers et de fumistes aux allures ridicules —tout un petit monde gouailleur et babillard, qui tenait à la fois de l’hôtel de Rambouillet et de la Cour des miracles. Bibi-laPurée y coudoyait le comte de La Rochefoucauld. Ces jeunes gens paraissaient éprouver de vaniteuses voluptés à s’exiler du monde. Ils cultivaient un jargon singulier ; ils affectaient des mœurs cyniques et mystérieuses, et ils avaient leurs dieux à eux, — mythiques et sacrés. Ils mettaient toute leur ardeur à vénérer d’une passion exclusive les physionomies les plus obscures et les plus inquiétantes des Lettres modernes. » {L’Aurore, 26 décembre 1902).

Un mort, s’étant un peu secoué de ces ordures, daigna se lever et dit :

« Certes, nous fûmes bien ridicules et nous eussions mieux fait de