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méros brillaient sur des plaques émaillées, de larges ventilateurs de gaze rayée d’argent renouvelaient sans cesse l’air des galeries ; l’industrie avait, en un mot, épuisé son luxe et sa prévoyance en faveur des nouveau-nés ; il ne leur manquait absolument que des mères.

À la suite des salles d’allaitement, se trouvait le second établissement, destiné au sevrage. On y recevait les enfants de quinze mois, et ils étaient soumis, dès lors, à une combinaison d’exercices destinés au perfectionnement des organes. Il y avait un appareil pour leur apprendre à voir, un second pour leur enseigner à entendre ; d’autres encore, pour les habituer à déguster, à sentir, à respirer.

— De votre temps, dit M. Atout à Maurice, l’enfant était abandonné à lui-même ; il se servait de ses poumons, sans savoir comment ; il agissait sans apprentissage ; il s’exerçait à vivre en vivant ! Méthode barbare, que l’absence des lumières pouvait seule justifier. Aujourd’hui nous avons amélioré tout cela. L’espèce humaine n’est plus qu’une matière vivante, à laquelle nous donnons une forme et une destination ; la Providence n’y est pour rien ; nous lui avons ôté le gouvernement du monde, qu’elle dirigeait sans discernement, et nous fabriquons l’homme à l’instar du calicot, par des procédés perfectionnés.

Du reste, ces premières études ne sont qu’une avant-scène de la vie ; c’est seulement au sortir de la maison de sevrage, que chaque enfant prend la route qu’il doit ensuite poursuivre.

— Et par qui cette route lui est-elle indiquée ? demanda Maurice.

— Par les docteurs du bureau des triages que vous avez devant vous.