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qui regarde autour de lui en frissonnant… L’orchestre joue une marche avec triangle et bonnet chinois ; on entend comme un sourd cliquetis d’écailles, puis on voit une trappe se soulever au fond, et deux monstrueux boas dresser leurs têtes.

Les amants sont restés à la même place, glacés, muets, une main tendue vers les reptiles. Ceux-ci se déroulent lentement, s’avancent de front.

Un souvenir traverse la pensée de Kléber. Il court à son ballon, l’approche de la fenêtre, fait entrer Astarbé dans la nacelle… mais il est déjà trop tard ; les boas ne sont plus qu’à quelques pas ; encore un élan, et ils atteignent leur proie. Tous deux font entendre un sifflement de joie ! quand un hurlement terrible leur répond !

Les deux serpents s’arrêtent ; Moïse vient de paraître à la fenêtre du cachot et se précipite à leur rencontre.

Ils reculent lentement, comme étonnés et incertains. Kléber profite de cette retraite pour entrer à son tour dans la nacelle, et le ballon disparaît.

Cependant les boas ont déjà repris courage ; ils se retournent, et un combat terrible s’engage. Moïse lutte d’abord avec avantage ; deux fois il se dégage des replis de ses ennemis, deux fois il les oblige à reculer ; enfin, ses forces s’épuisent ! enserré de nouveau dans leurs anneaux, il se débat plus faiblement, pousse une plainte sourde et tombe expirant.

Les boas, victorieux, font entendre un sifflement de triomphe et regagnent leur retraite.

Au même instant, un grand bruit de pas et d’armes retentit : Astarbé reparaît avec Kléber à la tête des soldats français ; mais ils arrivent trop tard ; le crocodile ne peut