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318 ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE SANSCRITE.

exemple et bien d'autres prouvent, clairement que la société hindoue, telle qu'elle avait été autrefois constituée, déclinait sensiblement, sous l'action du temps et des influences étran- gères, et que le respect, d'abord si profond, de ces peuples vis-à-vis de leurs prêtres et de leurs rois s'était considéra- blement affaibli.

Voilà donc à quel degré de scepticisme et de confusion était parvenu ce drame sanscrit, dont l'origine avait été toute re- ligieuse! Ces dieux et ces demi-dieux, ces héros et ces ermites, qu'on était primitivement si heureux et si fier de proposer, en plein théâtre, aux applaudissements et aux bénédictions populaires, ne fournirent plus par la suite que des prétextes de spectacles pompeux et de processions banales, ou même provoquèrent le doute et le sarcasme. C'est ainsi qu'Apol. Ion, Hercule et Bacchus, d'abord hautement célébrés sur la scène grecque, y furent présentés plus tard par Aristophane et ses émules sous des couleurs équivoques et dans des situa- tions compromettantes. C'est ainsi que nos mystères, si ap- plaudis par la naïve dévotion des spectateurs du XV e siècle, s'al- térèrent dès le siècle suivant, choquèrent un public moins in- génu et disparurent, à mesure que le vent orageux de la Ré- forme soufflait davantage à l'horizon. C'est la marche ordi- naire des choses humaines : elles se transforment, tantôt pour progresser, tantôt pour s'éteindre. Les auteurs, à peu près ignorés, auxquels nous avons consacré cet examen rapide, n'avaient plus qu'un rapport indirectjavec les vrais poètes de l'Inde ancienne, puisque les derniers de ces dramaturges tou- chent presque à notre époque et que les premiers étaient as- surément postérieurs à l'ère chrétienne; néanmoins il ne nous a pas semblé inutile de les étudier. Leurs œuvres, que nous avons dû joindre aux trois pièces qu'on supposait composées par l'illustre Kâlidâsa, méritaient, à coup sur, à défaut d'une vive admiration, une attention sérieuse et un jugement im- partial. L'exécution en fut généralement conforme aux prin- cipes d'une rhétorique, d'une poétique, d'une esthétique lo-

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