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270 ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE SANSCRITE.

posé pour la circonstance, entin dans un lieu quelconque plus ou moins clos et couvert. Leurs troupes étaient quel- quefois ambulantes et, à la manière des héros du Roman comique de Scarron, portaient dans des coffres leur garde- robe, qui du reste était variée et brillante; car les costumes, déjà si riches dans la vie ordinaire, devaient être exacts et somptueux au théâtre. Quand il le fallait, de jeunes garçons remplissaient des rôles de femmes : en Grèce du temps de Sophocle, en Angleterre à l'époque de Shakespeare, en France du vivant de Jodelle et même de Molière, ne pourrait-on pas citer des exemples analogues?

Sur ce théâtre, les décors et les machines rappelèrent tou- jours nécessairement l'enfance de l'art : la profusion inouïe des tableaux et des mouvements que les textes nous indiquent prouverait, à elle seule, que ces mouvements étaient fictifs, que ces tableaux étaient complétés par l'imagination complaisante du public. Passer à chaque instant d'un endroit à un autre, courir sur des chars, traverser des fleuves ou des mers, gravir des rochers, engager des batailles, s'envoler au ciel ; tout cela ne demandait ni aucun effort ni aucune dépense, vu que tout cela n'était que convention et apparence. Le prestige résultait uniquement de la bonhomie des spectateurs encore peu bla- sés; une pantomime expressive suppléait aux lacunes de la décoration : tous les mouvements de la mise en scène se ré- duisaient à de simples gestes: si l'art du machiniste était im- parfait, la crédulité de l'auditoire venait à son secours, se pas- sait d'accessoires inutiles et doublait les eifets de la repré- sentation. Nos mystères du XV e siècle et peut-être certains ouvrages de Skakespeare lui-même ne furent pas exécutés autrement; des êcriteaux d'une clarté et d'une commodité extrêmes prévenaient l'incertitude et fixaient l'attention par des indications de ce genre: « Ceci, Messieurs, vous repré- sente le paradis, le purgatoire ou l'enfer, Rome ou la Galilée, une montagne ou un vaisseau. » Tous se prêtaient franche- ment à l'illusion, et il n'y avait nul besoin alors, comme il le

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