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LE RAMAYANA. 181

hymnes; on sert un immense festin ; on immole des animaux choisis; et Bhàrata, ayant arrosé le monument funèbre de graisse, d'huile de sésame et de beurre clarifié, y met le feu. Chancelant comme s'il eût avalé du poison, égaré par la douleur, il se prosterne contre la terre ou contemple amèrement ce visage paternel que la mort va décomposer. Ses compagnons l'environnent, le relèvent, essaient de le calmer; mais, dès qu'il aperçoit les membres de Daçaratha enveloppés d'un nuage de flammes, il tend ses bras vers le ciel, pousse des soupirs prolongés et perd connaissance. Les pieux discours de Vasishtha, les libations, les ablutions, les riches cadeaux invariablement faits aux prêtres, rien ne sau- rait alléger son affliction. 11 a résolu de réparer les torts de sa mère, de chercher la retraite de Ràma, et de rendre la couronne à celui qui en est le légitime possesseur. Il part avec une magnifique suite : dix mille éléphants, soixante mille chars de guerre, cent mille cavaliers, et le reste à l'avenant; jamais les chiffres n'ont coûté à l'imagination des Hindous. Escorté par ses généraux, ses ministres, ses pontifes et même les trois reines, il rencontre le roi des Nishàdas, Gouha, qui craint d'abord quelque danger pour Ràma et qui s'ap- prête à le défendre ; mais le jeune homme le rassure et ar- rive à l'ermitage de Bharadvvàdja. Là, se place une scène fantastique avec laquelle les récits de nos contes de fées pour- raient seuls lutter et où le merveilleux prend des proportions inouïes. Comment l'ermite trouvera-t-il moyen d'héberger toute une cour et toute une armée? Rien de plus simple. Il tombe à genoux, invoque les dieux et prie un d'entre eux, Viçwakarman, le Vulcain ou le Dédale brahmanique, de des- cendre du haut des airs pour l'aider à offrir à ces milliers de voyageurs une hospitalité convenable. Les vœux d'un ascète ne sont jamais stériles : l'artiste divin accourt, construit un édi- fice éblouissant, plein de meubles et d'ornements splendides, prépare le plus exquis et le plus copieux des festins, répand çà et là des pluies de fleurs et des flots de parfums. Vingt

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