Page:Soupé - Études sur la littérature sanscrite.djvu/134

Cette page n’a pas encore été corrigée

HO ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE SANSCRITE.

forme comme on rejette un vêtement, dès qu'il est usé : donner la mort est donc une chose indifférente. Le devoir du guerrier est de se battre ; il n'est pas responsable des consé- quences qui résultent de l'accomplissement de ce devoir. Ni les succès ni les revers ne troubleront sa quiétude : ainsi que les eaux d'un lleuve se précipitent dans le vaste océan sans pouvoir même en déranger la masse, rien ne saurait nuire à l'égalité d'une raison parfaite. L'homme doit agir, mais sans se préoccuper des suites de ses actions. Il faut réprimer nos désirs, étouffer les passions qui obscurcissent en nous la conscience : il faut purifier son cœur, pratiquer la religion, présenter des offrandes aux dieux, s'abîmer dans l'éternité. Doctrine mystique, qui pose en principe l'indifférence abso- lue, puisque, d'après le texte, le yogui ou saint « voit du même œil l'humble et savant brahmane, la vache, l'éléphant, le chien et même l'homme dégradé qui mange de la chair de chien ! » Doctrine périlleuse ; car si elle engendre l'exal- tation, le dévoùment, les sacrifices, elle conduit aussi aux fanatiques horreurs des pagodes de Jaggernat ou aux stupi- des pénitences des solitaires, qui passent de longues années à sauter à cloche-pied, à rester debout contre une muraille ou à concentrer leurs regards fixes et immobiles sur une partie quelconque de leur corps ! Naître pour souffrir, souf- frir pour mourir, mourir pour renaître, tourner perpétuelle- ment dans un même cercle de misères ; telles étaient donc pour les Hindous les tristes perspectives de la vie future. De là la convoitise ardente qu'ils éprouvaient pour un repos éternel; de là leurs efforts afin d'arriver à tout prix à la délivrance finale, à ce qu'ils appelaient le Nirvana, soit que ce fût (car les érudits discutent encore sur ce point capital) une union délicieuse avec Dieu, soit que ce fût un simple retour au néant. En tout cas, le BMgâvad-Gîtâ abonde en graves sentences, en énergiques saillies, en instructions mo- rales, qui souvent se contredisent, mais dont l'ensemble est plein d'intérêt à cause de leur bizarrerie même. Il serait

�� �