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les mêmes services. Bhoûmimdjaya, pris au piège, charge sa sœur Outtara d’en parler à l’eunuque ; celle-ci va donc le trou- ver. Cette princesse, dont la beauté est parfaite selon le goût oriental, porte de brillantes guirlandes et une ceinture ornée de pierreries ; elle a les yeux allongés, le teint luisant comme l’or, les cheveux relevés en touffes, la taille mince et les jambes aussi solides que la trompe d’un éléphant. Elle remplit gracieusement sa mission près d’Ardjouna, qui parait devant le prince royal et feint de s’excuser; il ne sait, que chanter, danser, jouer de divers instruments ; il est à peine un homme. On ne l’écoute pas; on l’habille, on l’arme au milieu des rires des courtisans et des esclaves ; on part, on arrive en face des troupes ennemies qui sont nombreuses et redouta- bles. Bhoûmimdjaya change aussitôt de figure et de langage; ses cheveux se hérissent sur sa tête ; peut-il lutter seul contre une armée ? Son père a emmené tous les soldats ; il n’a plus même ses gardes : faible enfant, peu habitué aux fatigues de la guerre, sans secours, que deviendra-t-il? Que les femmes rient de lui, que les vaches soient perdues, peu importe ; il a peur, il fuira.

Indigné de trouver une telle lâcheté dans un si éminent personnage, Ardjouna s’élance à son tour, le poursuit, le saisit sans façon par les cheveux et le tire à lui, au point de lui arracher des cris lamentables. Il le ramène, violemment vers le char et lui en remet les rênes : qu’il occupe la place du cocher ; lui, le pauvre eunuque, il combattra. Le fils du roi des Matsyens n’ose répliquer; ils changent tous deux de rôle, et leurs adversaires, qui les aperçoivent de loin, se perdent en conjectures sur cet homme, vêtu en prince, qui pousse les chevaux, sur cet homme, habillé en danseur, qui s’apprête à combattre. Cependant il s’agit de reprendre, là où ils les ont cachées, les armes magiques des lils de Pàndou; en effet, quand ils commencèrent leur pèlerinage forcé à travers les forêts, ils les avaient enveloppées d’un sac qui avait la forme et la couleur d’un cadavre et avaient suspendu ce sac