Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
ŒDIPE.

Et qui te l’a apprise[1] ? Assurément ce n’est point ton art.

TIRÉSIAS.

Toi-même ! car c’est toi qui m’as contraint à parler,

ŒDIPE.

Qu’as-tu dit ? répète-le encore, pour que je le sache mieux. Je veux la bien savoir.

TIRÉSIAS.

N’as-tu pas entendu la première fois ? ou veux-tu m’éprouver[2] ?

ŒDIPE.

Non, pas assez pour dire que je le sache[3] ; répète donc.

TIRÉSIAS.

Je te dis que tu es ce meurtrier de Laïus que tu cherches.

ŒDIPE.

Ah ! tu ne m’outrageras pas deux fois impunément !

TIRÉSIAS.

Faut-il donc t’en dire davantage pour redoubler ta colère ?

ŒDIPE.

Dis tout ce qu’il te plaira ; tes propos seront vains.

TIRÉSIAS.

Je te le déclare, tu ignores les horribles nœuds que tu as formés avec ce que tu as de plus cher, et tu ne connais pas tout ton malheur.

ŒDIPE.

Penses-tu donc que ces injures resteront toujours impunies ?

TIRÉSIAS.

Oui, si la vérité a quelque puissance.

  1. Œdipe commence à soupçonner qu’on a suborné Tirésias, et l’on sait que c’est Créon qui lui a conseillé de mander le devin.
  2. Αέγειν, pour me faire parler.
  3. Il répond à la première question.