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LES LIMIERS[1]


Dans l’Arcadie septentrionale sur le mont Cyllène. Des rochers, des arbres. Au fond une grotte dont l’ouverture est fermée.

Apollon. — À tous les dieux et à tous les mortels j’annonce et… je promets de donner une récompense à qui me rendra les bêtes qu’on m’a enlevées. C’est, en effet, une chose extraordinaire, une chose douloureuse à mon cœur… mes vaches laitières, mes veaux, mon troupeau de jeunes génisses. Tout a disparu et c’est en vain que je suis les traces de mes bêtes : elles ont clandestinement déserté la mangeoire de leurs étables, rendues invisibles par des maléfices. Jamais je n’aurais cru qu’aucun dieu, qu’aucun mortel éphémère aurait poussé l’audace jusqu’à commettre pareil méfait. Aussitôt donc que je l’ai appris, saisi de stupeur, je pars, je me mets en quête, proclamant partout la chose aux dieux et aux hommes, pour que nul n’en ignore. Cette poursuite, cette chasse me passionne. J’ai parcouru les tribus du peuple entier des Thraces, mais personne…

(Suivent deux ou trois vers très mutilés ou dont il ne reste rien.)
  1. Le mot Ἰχνευταί, comme le remarque Allègre, n’a pas d’équivalent exact en notre langue : il désigne ceux qui, hommes ou bêtes, suivent une trace à la piste. Cf. Pollux, V, 10, ἰχνευτὴς ϰαὶ ἀνὴρ ϰαὶ ϰύων. Th. Reinach qui le premier fit connaître au public français le nouveau drame de Sophocle l’intitula les Satyres Limiers ou les Traqueurs. Les Allemands, avec Wilamowitz, traduisent le mot par Spürhunde. Les Anglais conservent l’expression grecque : Ichneutae. Terzaghi intitule sa traduction : I cercatori di traccie. Avec Allègre j’ai employé le mot Limiers. On pourrait aussi bien dire Ichneutes, mais le terme ne serait pas intelligible pour tous les lecteurs.