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le phylloxera

Nous qui sommes en dehors de ce mouvement, tâchons d’examiner froidement, impartialement, les chances de réussite des plantes exotiques, leurs avantages, mais aussi leurs dangers et les craintes que l’avenir nous inspire.

Et d’abord les vignes américaines résistent-elles ou plutôt résisteront-elles au phylloxera ? Au début elles résistaient toutes ; un peu plus tard on a fait un choix, aujourd’hui le cercle se resserre, et sauf deux ou trois variétés, celles qui sont aujourd’hui reconnues pour parfaitement résistantes ne sont plus des vignes, ce sont des sujets sauvages, ou, pour parler le langage technique, des porte-greffes. Je ne puis mieux faire ici que de citer le travail de M. Causse, président de la Société d’agriculture du Gard.

Dans une étude sérieuse, approfondie des vignes américaines qu’il a visitées partout où elles sont cultivées, il signale soixante-neuf variétés de plans. Or, dans ses conclusions, le Jaquez à peu près seul trouve grâce devant lui, comme vin de production directe. Ce vin je l’ai goûté, Messieurs : il est noir, épais, alcoolique ; coupé avec le vin du Puy, il serait buvable ; seul, je ne crois pas qu’on puisse l’avaler. L’Herbemont, le Cynthiana donnent du vin plus léger, mais le premier est de qualité très-inférieure, et le second produit si peu abondamment, qu’on ne peut raisonnablement compter sur son rapport.

Pourquoi donc cette diminution dans le nombre des sujets résistants, pourquoi cette décroissance à l’indemnité des ceps insensibles aux attaques du phylloxera ? À mon avis, Messieurs, les vignes américaines résistent au terrible insecte par la contexture de leurs racines, par leur extrême vigueur. Mais cette contexture, cette vigueur, elles les doivent à la nature, à la composition du sol, à des conditions climatologiques qui ne sont pas les nôtres. Résistantes au début, elles perdent de plus en plus cette faculté, et au champ d’expériences du Mas-de-las-Sorres, j’ai vu des taches phylloxériques au milieu d’un plan de Taylor, considéré pendant longtemps comme indemne, à l’école d’agriculture de Montpellier ; j’ai vu des racines de plans