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documents et notes sur le velay

Une fois lancé dans cette voie de conversion à outrance Louis XIV ne s’arrêta plus : tous ses actes furent empreints de cette invasion dans le for intérieur, de ce faux zèle, qui seraient risibles s’ils n’étaient odieux, et dont les écarts vraiment sauvages devaient porter de si terribles atteintes à la paix des âmes et aux intérêts économiques les plus essentiels du pays. Sous un régime de centralisation et d’absolutisme les préférences du maître engendraient les pires fléaux : la dévotion de commande, la piété officielle, cette hypocrisie sociale, enfin, dont les orgies de la Régence découvrirent si bien le masque et l’emprunt. On vit alors une société entière faire sa cour à un vieux despote en se ruant sur les huguenots : les habiles et les béats, la séquelle de cour et d’antichambre, les fonctionnaires gros et petits, tout l’ordre moral du siècle se mirent au diapason. Les protestants n’y purent tenir. Ils se déshabituèrent peu à peu de la patrie et entrevirent d’un œil avide l’exode, si funeste à la France, si profitable au futur royaume de Prusse. Les vexations de clocher, les insolences de la bureaucratie, les entraves industrielles apprirent à maintes familles cette voie douloureuse, ce calvaire de l’exil où cheminèrent, même avant l’acte final de la révocation de l’Édit de Nantes, tant de désolations muettes et d’héroïsmes inconnus. De là vinrent aussi en Velay et ailleurs ces révoltes, ces défis à une loi injuste, ces soulèvements d’outlaws, dont le titre qui suit offre un curieux exemple.

L’histoire est comme le soleil couchant, qui ne dore que les sommets des montagnes : elle se tient sur les hauteurs et néglige les humbles épisodes, accomplis dans un coin obscur, enfouis sous une couche épaisse de silence. Il appartient aux récits provinciaux d’exhumer ces drames oubliés où revit l’âme de nos pères avec son cortège d’espoirs et de tristesses. On le disait l’autre jour avec raison : l’histoire n’est faite ni pour nous enseigner le mépris du passé, ni pour nous accabler sous le souvenir de temps plus heureux ; elle s’écrit pour éclairer, pour fortifier par le spectacle d’autres époques où se sont agités des problèmes qui hantent sans cesse l’humanité et dont elle s’épuise