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REVUE INTERNATIONALE DE L’ENSEIGNEMENT

toute la ville, an voit le palais de la philosophie, où l’étude règne seule en souveraine, citadelle de lumière et d’immortalité., Cette île est la demeure éternelle des sept sœurs, les arts libéraux ; c’est là aussi que, par la trompette d’une plus noble éloquence, retentissent les décrets et les lois ; c’est là enfin que bouillonne la source de la science religieuse, d’où s’écoulent les trois ruisseaux limpides dont sont arrosées les prairies de l’intelligence (prata mentium), c’est-à-dire la théologie sous sa triple forme, historique, allégorique et morale ».

Ce témoignage ampoulé de Gui de Basoches est important par son ancienneté même, et parce qu’il indique l’endroit où se trouvaient alors les écoles, ainsi que les trois sortes d’enseignement qu’on y donnait : les arts, le droit canon et civil, et la théologie. Il n’y est pas question de l’enseignement médical, sans doute encore restreint et inaperçu. Mais dès le règne de Philippe-Auguste, la médecine était professée. On en trouve la preuve dans un éloge de l’Université de Paris, celui qu’a laissé l’historien Guillaume le Breton dans le passage de sa chronique relatif à l’année 1210[1]. : « En ce temps-là, les lettres florissaient à Paris. On n’avait jamais vu dans aucun temps et dans aucune partie du monde, à Athènes ou en Égypte, une telle affluence d’étudiants. Ceci ne s’explique pas seulement par l’admirable beauté de Paris, mais par les privilèges spéciaux que le roi Philippe et son père Louis VII avaient conféré aux écoliers. Dans cette nable cité étaient en honneur l’étude du trivium et du quadrivium, celle du droit canon et du droit civil, et aussi la science qui permet de conserver la santé aux corps et de les guérir. Mais la foule se pressait avec un zèle particulier autour des chaires où s’enseignait la sainte Écriture, où se résolvaient les problèmes de la théologie ».

Théologiens, décrétistes, artistes, professeurs et étudiants, composaient cette multitude des scolares Parisienses qui apparaît, au premier rang, dans toutes les solennités du règne de Philippe-Auguste. On les avait vus, en 1191, tenant leur place dans la grande procession que le clergé parisien organisa pour demander au ciel la guérison du prince Louis, l’héritier unique de la couronne[2]. Après lu bataille de Bouvines, en 1214, ils prirent leur large part des réjouissances populaires et prouvèrent leur attachement à la

  1. Edit. Delaborde, p. 230
  2. Rigord, ibid., p. 111, « infinita scholarium et populi concurrente multitudine ».