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L’UNIVERSITÉ DE PARIS SOUS PHILIPPE-AUGUSTE

Et il termine en enjoignant à ses successeurs de ne pas s’écarter de cette ligne de conduite. Déclaration et application de principes aussi absolues que pouvaient le désirer les partisans de la liberté d’enseigner, trop absolues même, puisque le seigneur de Montpellier ne faisait aucune mention des conditions de capacité que la société est en droit d’exiger de ceux qui forment les médecins. Plus tard, l’autorité ecclésiastique sera obligée de réglementer cette concession et de la préciser, en entourant l’enseignement médical des garanties conformes à l’intérêt public.

En réglant avec un libéralisme qu’il serait profondément injuste de méconnaître, l’exercice du droit d’enseigner, le pouvoir central de l’Église se préoccupait surtout des grandes écoles, ou des studia generalia, expression très employée dans les documents contemporains.

Il faut entendre par « grandes écoles » celles où affluait la jeunesse nationale et même internationale, et où l’on enseignait l’ensemble des sciences alors connues : au premier degré, les arts libéraux, le trivium et le quadrivium, base immuable de l’édifice scolaire, enseignement traditionnel toujours divisé et organisé comme au temps des Carolingiens ; au second degré, les études plus spéciales et de caractère professionnel, la médecine (physica), le droit civil (leges), le droit canonique (decretum) et la théologie (sacra pagina). Étudiants ès arts libéraux ou artistes, médecins, légistes, décrétistes, théologiens, toute cette population des grandes écoles qui poursuivait les carrières sacerdotales et même toutes les professions que nous appelons aujourd’hui « libérales », se pressait de préférence dans certaines villes : Paris, Orléans et Angers au Nord, Toulouse et Montpellier dans le Midi, étaient, au temps de Philippe-Auguste, les cités scolaires par excellence. Mais quelques-uns de ces grands centres d’études générales ont déjà des spécialités qui attirent le Français et l’étranger : à Paris, la dialectique et la théologie ; à Orléans, le droit civil et la rhétorique ; à Montpellier, la médecine. Devant la prospérité croissante de ces écoles, d’autres, comme Chartres et Reims, qui avaient eu, au xie siècle, leur période de gloire, déclinent et s’effacent. Elles tomberont peu à peu au rang de séminaires locaux.

Un trait commun aux grandes écoles est l’internationalisme, non seulement celui des étudiants, mais celui des professeurs. La science étant alors tout ecclésiastique, et l’Église de ce temps, cosmopolite, l’enseignement avait le même caractère. Paris, comme Orléans et Montpellier, fournissait des clercs gradés à toute l’Europe. Beaucoup de maîtres étrangers étaient pourvus de bénéfices, de canoni-