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REVUE INTERNATIONALE DE L’ENSEIGNEMENT

sens, la liberté de l’enseignement. Le 11e décret du 4e concile de Latran, tenu par Innocent III, en 1215, reproduit les mêmes prescriptions. Il décide en outre que, dans chaque église d’archevêché ou église métropolitaine, il sera créé un maître en théologie, un theologus, chargé d’apprendre sa science aux prêtres de la province et de surveiller l’exercice du sacerdoce paroissial[1].

Ces deux décrets étaient le signe d’un progrès réel. L’Église qui avait le monopole et la charge de l’instruction publique, essayait, par là, de légitimer le pouvoir considérable dont elle jouissait. La papauté, entre les mains de qui se concentrait l’autorité religieuse, cherchait visiblement à compléter, à unifier et à régulariser l’organisation scolaire qui s’était établie peu à peu, par créations isolées et spontanées, dans beaucoup de diocèses français, pendant le xie et le xiie siècle. Sur ce point capital, la liberté d’ouvrir un cours ou une école, la société du moyen âge obtenait de Rome une sorte d’affranchissement. Et les prescriptions des conciles ne sont pas restées purement théoriques. On a travaillé, presque immédiatement, à les faire passer dans les faits.

Deux ans à peine après que les principes avaient été proclamés au concile de Latran, en 1179, ils recevaient, à Montpellier, une application éclatante. En établissant, par une charte de janvier 1181[2] la liberté du haut enseignement, le seigneur de Montpellier, vassal immédiat de l’évêque, Guilhem VII], agissait, sans aucun doute, d’accord avec l’Église : car beaucoup d’autres documents du même temps prouvent que l’école de Montpellier, comme toutes les écoles de cette époque, était étroitement subordonnée au clergé. Guilhem VIII déclare s’opposer à tout monopole de l’enseignement de la médecine, dans sa ville et dans sa seigneurie. En dépit des instances les plus vives et des offres d’argent les plus séduisantes, precio seu sollicitatione, il n’accordera jamais à personne le privilège exclusif de lire ou de diriger des écoles en matière médicale, in facultale physice discipline. Le considérant est curieux et exprimé avec une clarté parfaite : « Attendu qu’il serait trop criant et trop contraire à la Justice et à la religion, contra fas et pium, d’octroyer à un seul le droit d’enseigner une science aussi excellente. » En conséquence, il autorise tous les particuliers, quels qu’ils soient, omnes homines, et d’où qu’ils viennent, qui voudront tenir école de médecine à Montpellier, à enseigner dans sa ville seigneuriale, avec pleine et entière latitude, nonobstant toute opposition.

  1. Mansi, ibid., p. 999. Cf. Chart. Univ. Paris., no 22.
  2. Cartulaire de l’Université de Montpellier, t. 1 (1890), p. 179.