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ait pensé sérieusement à faire par soi-même le commerce étranger.

Mais quoique cet ordre naturel de choses ait eu lieu jusqu’à un certain point en toute société possédant un territoire, cependant il a été tout à fait interverti, à beaucoup d’égards, dans tous les États modernes de l’Europe. C’est le commerce étranger de quelques-unes de leurs grandes villes qui a introduit toutes leurs plus belles fabriques ou celles dont les produits sont destinés à être vendus au loin, et ce sont à la fois les manufactures et le commerce étranger qui ont donné naissance aux principales améliorations de la culture des terres. Les mœurs et usages qu’avait introduits chez ces peuples la nature de leur gouvernement originaire, et qu’ils conservèrent encore après que ce gouvernement eut essuyé de grands changements, furent la cause qui les mit dans la nécessité de suivre cette marche rétrograde et contraire à l’ordre naturel.


CHAPITRE II.

comment l’agriculture fut découragée en europe après la chute de l’empire romain.


Lorsque les peuples de la Scythie et de la Germanie envahirent les provinces occidentales de l’empire romain, les désordres qu’entraîna une si grande révolution durèrent pendant plusieurs siècles. Les violences et les rapines que les barbares exerçaient contre les anciens habitants interrompirent le commerce entre la ville et la campagne. On déserta les villes, on laissa les campagnes sans culture, et les provinces occidentales de l’Europe, qui avaient joui, sous le gouvernement des Romains, d’un degré considérable d’opulence, tombèrent dans le dernier état de barbarie et de misère. Dans le cours de ces désordres, les chefs et les principaux capitaines de ces nations barbares acquirent ou usurpèrent pour eux-mêmes la majeure partie des terres de ces provinces. Une grande partie resta inculte ; mais, cultivée ou non, aucune terre ne demeura sans maître. Chaque usurpateur travailla à grossir son lot, et la plus grande partie se trouva réunie dans les mains d’un petit nombre de grands propriétaires.

Cette première réunion de terres incultes par grands lots en un petit nombre de mains fut une grande calamité, mais qui aurait pu n’être que passagère. Elles se seraient bientôt après subdivisées de nouveau ;